Méditerranée - Le test de l’Europe en Afrique du Nord

La réaction de l’Europe face aux révolutions historiques en Afrique du nord a vacillé entre euphorie et crainte. L’instinct naturel à célébrer et à soutenir la démocratisation à travers la Méditerranée fut tempéré par des inquiétudes sur l’éventualité d’une propagation de la crise sur les côtes européennes.
Quelques dirigeants ont évoqué un type de Plan Marshall post-seconde guerre mondiale comme modèle pour une assistance européenne au développement à grande échelle pour la région dont l’objectif serait d’assurer la viabilité de l’évolution démocratique et de générer des bénéfices politiques et économiques à long terme pour l’Europe. Mais plus généralement, la réaction a été bien plus craintive : la presse et les hommes politiques partout dans l’Union Européenne sont obsédés par la menace de vagues de migrants à leurs frontières.
Une telle menace ne devrait pas être prise à la légère. La controverse autour des migrants tunisiens en Italie fragilise déjà les fondations politiques de la libre circulation autorisée par la zone Schengen ; tandis que la guerre en Libye pourrait entraîner le départ de milliers de civils supplémentaires fuyant la violence et recherchant une protection internationale.
Jusqu’à présent, près de 400 000 personnes se sont amassés dans les camps de réfugiés en Tunisie et en Égypte et l’on estime à 20 000 le nombre de ceux qui auraient atteint les côtes italiennes. Gérer l’arrivée en masse de demandeurs d’asile va obliger l’Europe à renforcer sa capacité à offrir une protection temporaire – et même à revoir le fonctionnement de son système d’asile dans sa globalité. Le fait que l’Union ait travaillé dans le sens d’une approche commune à la sécurité des frontières, surtout avec le renforcement de l’agence de surveillance des frontières Frontex, sera ici d’une grande aide.
Mais si l’Europe se laisse dépasser par la crise immédiate, elle risque de gâcher une extraordinaire opportunité de long terme. Si elle profite de l’occasion de manière stratégique et judicieuse, l’Union Européenne aura la possibilité de redéfinir sa relation avec le sud de la Méditerranée pour promouvoir un développement et une croissance générationnels qui soient aussi en phase avec les intérêts européens.
La meilleure manière de soulager les craintes européennes et d’éviter une migration non contrôlée est d’établir des incitations positives et des dispositifs pratiques pour convaincre les migrants de rester chez eux – principalement en y créant des emplois. Car la grande majorité des migrants quittent en effet leur pays à contre cour.
Pourtant, dans le même temps, et alors que ses baby boomers vont massivement partir à la retraite dans la décennie à venir, l’Europe aura besoin de travailleurs de tous niveaux de compétence. Le sud méditerranéen, avec ses très nombreux jeunes, peut être la source de cette main d’oeuvre. Il faudrait donc veiller à ce que les migrants aient l’opportunité d’acquérir les compétences utiles aux employeurs européens et qu’ils aient la possibilité de déménager de manière sûre, légale et organisée.
Des dispositifs qui permettent de former la prochaine génération de nord-africains et de les autoriser à circuler plus librement entre l’Europe et leur pays natal seraient une solution bien plus intelligente que l’approche actuelle, qui encourage une migration illégale sans qu’elle ne corresponde aux besoins européens de main d’oeuvre. Ceci n’est pas un argument en faveur de plus de migration mais plutôt pour une meilleure migration – bien pensée et planifiée.
Bien sûr, la participation de l’Europe à une aide visant à établir des démocraties durables et prospères en Afrique du nord constituerait la meilleure dissuasion à long terme contre la migration illégale. Il est bon de rappeler que cinquante ans en arrière, les principales vagues d’immigrations vers le nord de l’Europe provenaient d’Italie, de Grèce, du Portugal et de l’Espagne. Au fur et à mesure que ces pays ont prospéré, les émigrés sont retournés chez eux : leurs pays ont fini par devenir les moteurs de la croissance européenne, et d’importants marchés d’exportation pour l’Allemagne, la France, et d’autres Etats membres de l’UE. Le même arc de développement peut et doit être mis en place pour le sud méditerranéen.
Par chance, les études sur la migration et le développement menées ces dernières années ont permis de concevoir un ensemble d’outils que l’Europe devrait envisager d’utiliser. Les experts et les politiciens ont développé de nombreux programmes innovants, dont la possibilité pour les migrants de transférer des fonds à moindre frais vers leurs pays d’origine, des efforts pour renforcer les liens entre les diasporas et leurs pays d’origine et des initiatives permettant aux migrants qualifiés de trouver un emploi adapté, pour que des chirurgiens qualifiés ne se retrouvent chauffeurs de taxi.
La réflexion sur la nouvelle relation à établir avec le sud méditerranéen doit s’inspirer largement de ces idées. Pour relier nos sociétés de manière positive, nous devrions sérieusement envisager une libéralisation des régimes commerciaux pour ouvrir d’autres voies à la migration légale, et développer le nombre d’étudiants de la région qui viennent étudier et se former professionnellement en Europe. Car la chute des dictateurs en Egypte et en Tunisie a pour une grande part été provoquée par la jeunesse nord-africaine, à la fois sur place et à l’étranger, et ses idées de liberté. Il faut désormais miser sur les talents et l’énergie de ces jeunes pour les aider à reconstruire leurs sociétés.
Répondre aux défis et aux opportunités de ce moment exige la création de partenariats forts entre les Etats, les institutions internationales et les acteurs non gouvernementaux. Depuis sa mise en place en 2006, le Forum Global sur la migration et le développement (FGMD) s’est avéré être une plateforme bien nécessaire pour le dialogue entre les Etats et les autres parties prenantes sur les questions de migration et de développement. Ses sessions plénières annuelles facilitent les échanges d’expérience et de bonnes pratiques d’une façon qui transcende les conflits traditionnels « nord-sud ».
Parmi les changements qu’il a initiés, le FGMD a forcé les gouvernements à envisager la migration de manière plus holistique et à développer une approche gouvernementale globale pour répondre aux opportunités et aux défis qu’elle pose. Il a aussi insisté sur l’importance pour le développement de protéger les droits des migrants et de combattre la migration illégale.
Le Forum Global a fait sa part du travail en produisant des idées susceptibles de faire de la migration un bénéfice pour le développement des pays d’origine et de destination. Il est grand temps que ces idées soient appliquées. Il n’y a pas meilleure opportunité pour cela que cette ouverture stratégique cruciale dans l’histoire de l’Europe et du sud méditerranéen. Si nous ne profitons pas de cette opportunité pour agir, il se pourrait bien que l’histoire nous oublie.
Par Peter Sutherland - LesEchos.fr - le 29 avril 2011
Copyright: Project Syndicate, 2011.
Traduit de l’anglais par Frédérique Destribats
Source :
http://lecercle.lesechos.fr/node/34797
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Un parcours méditerranéen

Un parcours méditerranéen - Arts - Photo & vidéo
Lieu : Fnac de Marseille - Bourse
Dates : du 5 Mai 2011 au 19 Juin 2011
Présentation
Un parcours méditerranéen (une exposition de six photographes présentées à Sanary à l'occasion du premier festival de la photographie méditerranéenne)
Berceau de l'antiquité, trait d'union entre les civilisations d'Europe, d'Afrique et d'Asie, la Méditerranée est le lieu de tous les contrastes et de toutes les passions. Mille fois décrites et chantées, ses rives ensoleillées ont de tout temps attiré écrivains, peintres et poètes.
Mais si le 'Grand Tour' (expression qui est à l'origine du mot tourisme) se perpétue aujourd'hui à travers le regard des photographes qui inscrivent leur pas dans ceux de leurs illustres prédécesseurs, qu'en est-il de leur démarche et de leur motivation ? A l 'heure de la mondialisation, peut-on parler d'une photographie méditerranéenne, d'une spécificité qui lui serait propre et dont l'exotisme serait absent ? La sélection de photographies que vous proposent les galeries de la Fnac s'attache à ouvrir des pistes, explorer des tendances, amorcer un premier état des lieux.
Source
http://www.evene.fr/culture/agenda/un-parcours-mediterraneen-31477.php
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Méditerranée - Monde arabe: les révoltes pourraient "stimuler l'économie" à long terme

Les évolutions politiques dans le monde arabe dues au mouvement de révoltes "pourraient stimuler l'économie" de ces pays à long terme, mais devraient peser à court terme sur les pays importateurs de pétrole, selon un rapport du Fonds monétaire international publié mercredi.
"Les changements actuels dans la région pourraient stimuler les économies" à long terme, affirme le FMI dans son rapport prospectif sur la région du Moyen-Orient et de l'Asie centrale.

Les révoltes dans le monde arabe ont conduit au départ des présidents égyptien Hosni Moubarak et tunisien Zine El Abidine Ben Ali, tandis que des mouvements de protestation, dont certains violemment réprimés, ont eu lieu notamment en Libye, au Yémen, et en Syrie et au Bahrein.
"Un programme de réforme plus complet qui prend en compte les demandes de la population et lui donne un meilleur accès aux opportunités et à la concurrence pourrait dynamiser les économies et renforcer les atouts de la région", ajoute le FMI.
Parmi ces atouts figurent "une population active jeune et une situation géographique privilégiée à la croisée des chemins entre les grands marchés en Europe et les économies émergentes en Asie et Afrique sub-saharienne en pleine croissance".
A court terme, la vague de révoltes comporte des risques pour les économies importatrices de pétrole dans le monde arabe, dont "une forte hausse des prix du pétrole et une augmentation des déficits".
Le FMI souligne également qu'"une nouvelle détérioration de la confiance des investisseurs et une fuite des capitaux pourraient conduire à des difficultés de financement pour les gouvernements".
La croissance en 2011 des pays exportateurs de pétrole devrait atteindre 4,9%, hors Libye, "largement due à l'augmentation des prix du pétrole et de la production", estime le FMI.
Parmi ces pays figurent l'Algérie, l'Iran, l'Irak, le Koweït, Oman, le Qatar, l'Arabie saoudite, le Soudan, les Emirats arabes unis ainsi que le Yemen et le Bahreïn, en proie à de graves violences.
Les performances des pays du Golfe resteront bonnes en 2011 en raison de la hausse des prix du pétrole, "à l'exception du Bahreïn où l'incertitude prévaut", souligne le FMI.
Le Qatar, riche en gaz, devrait connaître une croissance de 20% en 2011 après 16,3% en 2010. Celle d'Arabie saoudite, plus grande économie de la région, a également été revue à la hausse et devrait atteindre 7,5% cette année contre 4,5% prévu en octobre.
En revanche, les pays importateurs de pétrole -- comme l'Egypte et la Tunisie -- pâtissent de l'envolée des prix du brut et des perturbations de l'activité économique et la croissance ne devrait pas y dépasser 2,3% en moyenne en 2011, note le FMI.
La croissance de l'Egypte devrait ainsi plafonner à 1% cette année contre 5,1% en 2010.
L'Egypte n'est pas un producteur de pétrole mais le pays arabe contrôle des voies de transport du brut stratégiques vers l'Europe: le canal de Suez et l'oléoduc Suez-Méditerranée (Sumed).
L'Afghanistan, Djibouti, la Jordanie, le Liban, la Mauritanie, le Maroc, le Pakistan, la Syrie et la Tunisie sont également des pays importateurs de pétrole.
L'Egypte et la Tunisie devraient en outre être affectés par les conséquences du conflit libyen et le retour de plus de 100.000 migrants dans ce pays.
Ces deux pays pâtissent déjà d'un "coup d'arrêt dans le tourisme et des investissements directs étrangers" avec des déficits budgétaires qui devraient atteindre 9,7% du PIB en Egypte et 4,3% en Tunisie, selon le FMI.
Source LeParisien.fr - le 28 avril 2011

Pour une réelle coopération énergétique en Méditerranée

Processus de Barcelone, 5+5, Union pour la Méditerranée (UpM), Desertec, Medgrid, Apolo sont autant de cadres institutionnels et projets industriels censés mettre en place une coopération en Méditerranée, notamment dans le domaine énergétique. Le Processus de Barcelone, par exemple, ne se promettait-il pas, dès son lancement en 1995, de considérer l'énergie comme «le moteur du développement économique et de la coopération dans la région euroméditerranéenne» ?
Qu'en est-il aujourd'hui, alors que souffle sur certains pays du Sud de la Méditerranée un vent de changements, aussi bien géopolitiques, économiques que sociaux, qui ne seront pas sans conséquence, tant sur le développement même de cette rive que sur le futur des relations avec les pays nord-méditerranéens.
Le moins que l'on puisse dire est que les réalisations enregistrées jusqu'ici en matière de coopération énergétique restent d'une portée limitée, en tous les cas peu ambitieuses au regard du potentiel et des besoins de la région et surtout, qu'elles ne s'inscrivent pas dans le cadre d'une approche globale axée sur les complémentarités et les solidarités actives, plus que jamais nécessaires. Aussi, n'est-il pas temps de se questionner sur «le pourquoi» de l'insuffisance de réussite de toutes ces initiatives ?
Comme il est urgent de s'enquérir du «comment», ainsi que de l'envergure et des enjeux d'une réelle coopération énergétique. S'agit-il de maintenir encore le schéma existant avec les résultats que l'on connaît, ou faut-il opérer à un réel changement à un renouveau, d'une part, dans les rapports entre les pays du Maghreb eux-mêmes et, d'autre part, entre le Maghreb et l'Europe. Il y va des aspirations au développement de nombreuses populations, voire bien plus, de la stabilité même de l'ensemble de la région euro-méditerranéenne.
Est-il nécessaire de rappeler que des déséquilibres mal gérés ou des inégalités trop criantes ont été, de tout temps, source d'incompréhensions, de tensions, voire de conflits.
Le cas est édifiant en région méditerranéenne, notamment à l'Ouest, tant pour ce qui concerne les pays du Maghreb entre eux, qu'avec leurs voisins de la rive nord. En effet, que constatons-nous en examinant la situation qui prévaut actuellement dans cette région : contraintes, différences et déséquilibres, qui ont tendance à persister, voire à s'aggraver, et ce, dans tous les domaines, notamment pour les questions énergétiques. Afin de pouvoir apprécier, d'une part, le niveau des contraintes et, d'autre part, l'importance du rôle de l'énergie et l'intérêt d'une démarche commune, il y a lieu d'abord de tirer certains constats globaux, qu'ils soient d'ordre socioéconomique ou commercial, qui ne sont pas sans impact sur le plan de la disponibilité énergétique future et donc, sur le développement de toute la région.
Les constats
1- En matière démographique,
contrairement au Nord, la population des pays du Maghreb, en majorité jeune, augmente à un rythme soutenu, engendrant des besoins de plus en plus importants et, surtout, de plus en plus pressants.
2- Sur le plan économique, même si l'expression peut paraître quelque peu forte, on peut dire qu'il y a «deux mondes bien distincts» au regard de l'importance des écarts de développement et de revenus par habitant entre les pays des deux rives de la Méditerranée. Face à une zone riche qui dispose de technologies, de savoir-faire et de ressources financières, le Sud continue de se débattre dans des problèmes de développement de type basique, tels que le logement, l'eau, l'emploi, l'éducation, la représentativité, etc. Et, l'écart de développement est en rapport avec l'ampleur des besoins. Les différences de prospérité sont telles qu'elles ont un impact à caractère assujettissant sur les relations entre les pays du Nord et ceux du Sud, et ce, au détriment de l'établissement de partenariats réels et équilibrés.
3- En matière énergétique, les inégalités et les insuffisances sont également nombreuses, tant pour ce qui concerne le niveau de consommation, la disponibilité et la répartition des ressources que pour ce qui est des échanges. C'est ainsi qu'un habitant du Nord de la Méditerranée consomme trois fois plus d'énergie qu'un habitant du Sud méditerranéen.

Si au Nord, les pays européens sont de plus en plus dépendants des importations de pétrole et de gaz, les réserves d'hydrocarbures au Maghreb sont importantes mais inégalement réparties, concentrées pour l'essentiel en Algérie et en Libye.

Alors que les échanges intra-maghrébins restent très faibles voire insignifiants, d'importants flux énergétiques Sud-Nord se sont développés ces dernières années. Ils restent, cependant, cantonnés à une relation purement commerciale et donc, d'un niveau bien en-deçà du potentiel d'échanges qui serait offert par un partenariat basé sur des interdépendances recherchées, économiquement viables et politiquement acceptables.

Les effets de ces contraintes, différences et déséquilibres sont nombreux et multiformes. Se posent alors les questions, notamment des moyens financiers et des infrastructures, de la disponibilité énergétique et de la sécurité d'approvisionnement, des dépendances et des termes d'échanges.

Le résultat en est qu'il existe aujourd'hui un déficit de confiance, voire une certaine défiance, aussi bien entre Nord et Sud qu'entre les pays du Maghreb eux-mêmes. Au sud de la Méditerranée, ce déficit est même doublé d'une inégalité dans la redistribution, qui pèse lourdement sur le développement de cette rive. Le lancement de larges coopérations est ainsi entravé, réduit par des approches dépassées et des pratiques incongrues du développement et de la coopération.
Les approches
1- En effet, pour les pays du Maghreb,
«le Chacun pour soi», adopté jusqu'ici et basé sur une vision essentiellement nationale des problèmes de développement, se heurte, notamment à l'étroitesse des marchés respectifs, à la faible solvabilité des demandes locales, à l'insuffisance des infrastructures et à une déficience en matière de capacité de conception et de réalisation.
Au lieu de favoriser leurs échanges ainsi que les complémentarités de leurs structures productives, afin, d'une part, de lever les contraintes liées, notamment au marché, au financement et à la capacité de réalisation et, d'autre part, de constituer des partenaires fondamentaux pour des tiers, notamment les entreprises européennes, les pays du Maghreb se sont évertués à développer séparément leurs exportations de matières premières et de produits primaires et à attirer des investissements étrangers.
La situation est qu'ils se retrouvent plutôt en concurrence, aussi bien pour écouler leurs produits à l'international que sur le marché des capitaux. A cela s'ajoute le fait que leurs exportations, peu diversifiées, restent très sensibles aux facteurs exogènes : prix du pétrole pour l'Algérie et la Libye, aléas climatiques et tourisme pour le Maroc et la Tunisie. Pour preuve de l'importance de ces insuffisances et/ou de ces manques, je mentionnerais l'exemple du commerce intra-maghrébin qui ne représente que 3% environ des échanges extérieurs de la zone.
Certains experts estiment que le retard accusé dans le processus d'intégration économique de l'Union du Maghreb arabe coûte à chacun de ces pays 2% de PIB par an. Aussi, la question qui se pose est celle de la capacité de ces pays à mobiliser, séparément, les moyens nécessaires à leur développement, compte tenu de leur situation économique et de la faiblesse des moyens financiers publics disponibles.
2- Pour ce qui est de l'Europe, principal partenaire commercial des pays du Maghreb, son approche est caractérisée par une vision, pour le moins, «courte». Elle a tendance à les considérer en de simples pourvoyeurs de matières premières énergétiques et de produits primaires et/ou en des opportunités de marché séparées, pour écouler des produits manufacturés, des produits de large consommation et des services.
La coopération entre les deux rives a souvent pris la forme d'une assistance du Nord au Sud, accompagnée de dépendances diverses, notamment commerciales, financières et technologiques ; les pays du Maghreb continuant d'importer au prix fort des technologies, sans être en mesure de pouvoir les reproduire et encore moins les développer.
Aussi, les conditions d'un réel partenariat sont loin d'être réunies. Force est donc de souligner qu'il est temps pour les pays du Maghreb de considérer les atouts qu'offre l'ensemble régional, tant sur les plans géostratégique, économique, commercial et financier que sur le plan de la force de travail constituée par une population jeune.
En outre, la nécessité de donner une dimension nouvelle à la coopération entre les deux rives n'a jamais été aussi forte et aussi pressante.
C'est ainsi, par exemple, qu'ils devront se doter d'une capacité additionnelle de production d'électricité de plus de 23 GW dans les 10-15 prochaines années, soit un doublement de la capacité actuelle.
Au total, et sans tenir compte du renouvellement des centrales existantes, ce sont près d'une cinquantaine de nouvelles unités d'une capacité de 500 MW chacune qui seraient à construire. C'est une très forte sollicitation en matière de moyens financiers et de capacités de réalisation. Pour faire face à ce challenge de grande ampleur, la coopération intra-maghrébine pourrait s'articuler, sans que cette liste ne soit exhaustive, sur :
le développement des échanges énergétiques
C'est une nécessité économique et sociale. L'énergie serait un moteur de développement et d'élévation du niveau de vie des populations locales. Elle contribuerait également à résoudre les graves problèmes engendrés notamment par l'insuffisance en eau, la sécheresse, la déforestation, etc.
Globalement, ce sont près de 20 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) contre moins de 4 Mtep actuellement, qui pourraient faire, à l'horizon 2020-2025, l'objet d'échanges entre les pays du Maghreb, représentant ainsi 15% de la demande d'énergie primaire de l'ensemble maghrébin.
(I)- La réalisation de pipelines multiproduits pétroliers (LPG, essence et diesel) reliant des centres de distribution et/ou d'enfûtage, situés de chaque côté des frontières de ces pays. Une telle initiative, outre qu'elle répondrait aux besoins croissants des populations locales, mettrait fin à l'important trafic transfrontalier qui échappe à tout contrôle.
(II)- Le renforcement et l'exploitation optimisée des interconnexions électriques. Par ce biais, les échanges électriques seraient plus importants et de nombreuses contraintes, liées aux capacités de production et aux pics de la demande, pourraient être atténuées.
La réalisation de projets intégrés en partenariat à intérêts croisés et multiformes
Un plan global et optimal viserait, outre la prise en charge de l'approvisionnement en produits semi-finis et finis d'un vaste marché intérieur, à considérer des opportunités d'exportation maghrébines de produits à plus forte valeur ajoutée et donc plus rémunérateurs qu'offrent notamment, la pétrochimie, l'industrie des engrais, les industries de transformation, l'industrie automobile, les fibres textiles, l'industrie pharmaceutique, etc.
Penser en commun le développement durable
Avec la mise en œuvre de politiques communes et volontaristes, basées, d'une part, sur l'économie d'énergie et l'efficacité énergétique et, d'autre part, sur une large exploitation du solaire et de l'éolien. Les pays maghrébins ont initié, ces dernières années, un certain nombre de projets de développement durable. C'est louable certes, mais nettement insuffisant puisqu'ils le font séparément.
Ne faudrait-il pas plutôt considérer la mise en place, à l'échelle régionale, d'un grand nombre d'unités de production d'électricité solaire alliée, à la fabrication au Maghreb même des équipements et accessoires. Par ailleurs, ce projet intégré à l'échelle du Maghreb aurait un impact certain sur les développements économique et social des zones rurales avec, notamment, l'utilisation des techniques de pompage d'eau et, par conséquent, de l'irrigation pour l'agriculture, la mise en place de petites unités de transformation, de stockage, de froid, voire même le développement de l'attrait touristique de ces régions semi-désertiques.
Promouvoir la sous-traitance
Notamment la fabrication des pièces de rechange industrielles, en développant un puissant tissu de petites et moyennes entreprises (PME), qui fédérerait toutes les expertises techniques existantes et/ou pouvant être développées à l'échelle du Maghreb.
Le partenariat euro-maghrébin
Quant au partenariat euro-maghrébin, il nécessite d'être repensé et conçu sur une toute autre logique des rapports. La relation de dépendance de chacun des pays du Sud vis-à-vis de l'ensemble européen, qui prévaut actuellement, doit être rompue et transformée progressivement en un partenariat intégré. Le préalable est qu'il est temps que les pays du pourtour méditerranéen veuillent, enfin, inscrire leurs politiques énergétiques dans le cadre d'une démarche commune pour un développement régional équitable et profitable à tous.
A titre d'illustration sont mentionnées ci-après quelques lignes directrices et/ou projets de coopération :
1- la sécurisation de la relation énergétique
Le premier obstacle à la sécurité énergétique des pays européens est incontestablement l'incertitude, souvent volontairement entretenue, qui pèse sur la demande, impliquant par-là même une incertitude au niveau des importations requises.
Le niveau des réserves d'hydrocarbures dans la région est certes important, mais la mise à disposition à temps de volumes additionnels de pétrole et de gaz, dont aura besoin l'Europe, n'en est pas entièrement assurée, tant les investissements nécessaires sont extrêmement élevés et tant le risque marché est trop important pour être pris en charge par les producteurs seuls.
Aussi, il y a lieu donc d'intégrer le souci des pays fournisseurs, à savoir une sécurité des débouchés et une valorisation de leurs ressources, à la volonté de l'Europe de disposer d'un marché libéralisé, et ce, en développant des partenariats industriels ambitieux, stables et à long terme.

C'est ainsi que des participations croisées Nord-Sud, à tous les niveaux de la chaîne, de la prospection à la distribution en passant par la production d'électricité, garantiraient à la fois la sécurité des approvisionnements pour les uns et la sécurité des débouchés pour les autres. Une telle option permettrait d'éviter les aléas des simples relations commerciales du binôme vendeur-acheteur.

Aujourd'hui, il est plus que nécessaire de donner de la cohérence à l'industrie énergétique en traitant la question de la sécurité dans une perspective globale, du développement des réserves jusqu'à la consommation. Néanmoins, cette cohérence ne pourra être développée que dans un cadre réglementaire stable et à long terme, qui tienne compte, en toute objectivité, des intérêts des différentes parties.
2- Projets structurants :
Il reste, cependant, qu'une visibilité à long terme et une vision commune sont plus que jamais nécessaires. Elles permettraient de mobiliser les moyens financiers pour le développement de nouvelles infrastructures, notamment :
(i)- La participation au projet du gazoduc Nigeria – Algérie de sociétés de gaz européennes (notamment Espagne, France, Italie) relèverait d'un partenariat stratégique et structurant.
En effet, l'opportunité, pour les sociétés européennes, serait de former avec Sonatrach algérienne un consortium pour acheter du gaz nigérian, le transporter jusqu'à Hassi R'mel pour l'y réinjecter et le stocker. Les sociétés européennes se constitueraient ainsi des réserves, et puiseraient leur part en fonction de leurs besoins.
Ce projet aurait de nombreux mérites, notamment :
• Energétique, puisqu'il contribuerait pour près de 1000 milliards de m3, correspondant à des livraisons telles qu'envisagées de 30 Gm3/an sur 30 ans et plus, à l'approvisionnement à long terme de l'Europe, tant par gazoducs que sous forme de GNL ;
• Industriel, de par les fortes retombées économiques qui en résulteraient pour tous les acteurs concernés ;
• Economique et commercial grâce, d'une part, à un investissement à moindre coût et, d'autre part, à sa flexibilité contractuelle, technique et opérationnelle permise par le gisement de Hassi R'mel, qui aura un rôle de réservoir poumon”;
• Politique, car il pourrait, en étant à la base d'un développement local, aider à endiguer les flux migratoires des populations des pays de transit.
(ii)- Un autre projet à moyen-long terme, celui-ci à l'échelle méditerranéenne, porterait sur la réalisation d'un gazoduc MENA qui relierait plusieurs pays exportateurs de gaz du Moyen-Orient et du Maghreb à l'Europe du Sud.
Il partirait d'Irak en passant par la Jordanie pour relier l'Egypte par «l'Arab Gas Pipeline» existant, qui serait renforcé et utilisé en sens inverse, puis traverserait la Libye pour aboutir en Algérie à Hassi R'mel.
Ce projet présenterait de nombreux avantages, notamment :
* La mise à la disposition des acheteurs européens d'importantes quantités de gaz en provenance du Moyen-Orient et du Maghreb ;
• Ce gazoduc ne traverserait que des pays producteurs-exportateurs de gaz naturel et permettrait de développer des gisements de gaz existant notamment en Libye ;
• Une grande flexibilité technique et contractuelle et une importante diversification, puisque le gisement de Hassi R'mel, fonctionnant en «hub», desservirait les pays acheteurs, tant à l'Est qu'à l'Ouest du bassin méditerranéen que sous forme de GNL.
3- Un plan global de réalisation de centrales électriques, en partenariat dans le cadre de sociétés mixtes, est envisageable. L'accès des populations des pays du Sud à l'énergie devrait être à l'image de ce qu'est la sécurité de l'approvisionnement énergétique des pays du Nord.C'est là aussi un des grands enjeux d'une nouvelle coopération euro-maghrébine.
Bien que l'électrification dans les pays du Sud ait fait d'importants progrès au cours des dernières années, beaucoup reste à faire. Les différences de dotations en matière de capacité de production entre pays du Sud et pays du Nord donnent un aperçu des efforts à consentir.L'idée serait de mettre en œuvre un plan global de réalisation en partenariat, dans le cadre de sociétés mixtes euro-maghrébines de centrales de production d'électricité. Certaines centrales seraient couplées à des unités de dessalement d'eau de mer, contribuant ainsi à la résolution du problème de l'eau, devenu crucial pour l'avenir de cette région, et d'autres centrales pourraient être dédiées, pour partie, à l'exportation d'électricité.
Les réformes adoptées séparément par les pays maghrébins au cours de ces dernières années, et qui vont dans le sens d'une ouverture de leurs marchés, devraient, bien entendu, être harmonisées et rendues compatibles.
Le développement des interconnexions électriques est un facteur-clé, puisqu'il permettra de mieux exploiter les complémentarités non seulement entre pays du Sud, mais également entre l'Afrique du Nord et le marché européen.
4- Le développement durable offre également de nombreuses opportunités qui, si elles venaient à être concrétisées, permettraient de consacrer le démarrage de collaborations intersectorielles et la naissance de nouvelles approches de coopération régionale.
Pour exemple, un projet pourrait porter sur la réduction, à l'échelle régionale, des impacts du réchauffement climatique. En effet, plusieurs études montrent que la région méditerranéenne ne sera pas épargnée, loin s'en faut, en particulier sa rive sud qui sera très durement touchée dans les toutes prochaines années par ce phénomène.
Il est vital pour ces pays de prendre, rapidement et dans un cadre global et intégré, des mesures pour pallier les effets de la sécheresse, répondre aux besoins en eau et à une quasi généralisation de la climatisation dans le bâtiment, réduire les rejets atmosphériques et autres.
L'utilisation de technologies à faible émission de carbone, notamment le solaire et l'éolien, devrait être systématiquement mise en avant. Un tel projet, dont les retombées seraient nombreuses sur le plan local, contribuerait également :
Des politiques énergétiques plus cohérentes aux plans national et régional sont donc à mettre en œuvre rapidement, notamment avec la mise en place de réformes réglementaires et d'instruments économiques incitatifs (restriction en matière de rejets, tarification de l'eau, taxes sur les pollutions, subventions pour les technologies propres, etc.) adaptés aux réalités des pays méditerranéens.
Pour ce qui est de l'électricité solaire qui, comme le prévoient certains projets, serait importée par l'Europe dans le cadre de projets d'envergure, de nombreuses questions restent à débattre. Parmi les plus importantes, on mentionnera :
- Les pays du Sud doivent-ils consacrer une partie de leurs ressources propres (notamment financières) à la réalisation de centrales solaires à concentration pour exporter de l'électricité ?
- Dans le cas contraire, sur quelle base les importateurs pourront-ils réaliser et exploiter ces centrales ?
- Serait-ce dans le cadre de la concession d'un droit de jouissance d'un terrain, non pas riche en pétrole et en gaz mais… en soleil ?
- Faut-il définir une «rente solaire» à l'instar de la rente pétrolière, à savoir par exemple le paiement de quelques cents par KWh produit ?
- Quelles seraient les ressources en eau qui seraient utilisées et dans quel cadre, sachant que, d'une part, l'exploitation de ces centrales solaires nécessite d'importantes quantités d'eau et que, d'autre part, la consommation en eau, en constante progression, frôle déjà les limites, 75 à 80%, des ressources renouvelables des pays du Sud.
Les réponses à tous ces questionnements ne peuvent être considérées que dans le cadre d'un développement en commun et d'une vision globale.
5- L'option du nucléaire, qui à terme sera nécessaire pour compléter l'offre d'énergie, est également un domaine de coopération.
La plupart des pays du Sud étudient la possibilité d'introduire le nucléaire dans leur bouquet énergétique.
Lourde et contraignante, son développement devrait s'inscrire dans une dynamique régionale mettant en œuvre une coopération technique et industrielle étroite entre les sociétés électriques du Maghreb et des sociétés européennes, qui maîtrisent la technologie et le traitement des déchets radioactifs.
6- Formation et recherche & développement
Il serait illusoire, à mon avis, de vouloir développer des partenariats réels et durables sans accompagnement en matière de formation et de recherche & développement.
C'est ainsi que pourraient être implantés, notamment au Sud, des instituts régionaux de formation dans différents domaines et filières ayant trait aux industries des hydrocarbures, de l'électricité, des énergies renouvelables et du développement durable.
Les formations, couronnées par des diplômes reconnus dans toute la région euro-méditerranéenne, pourraient être assurées par des formateurs et spécialistes des pays concernés.
Ces instituts seraient appuyés par des centres de recherche et développement, qui élaboreraient des programmes de recherche appliquée sur des sujets d'intérêt commun.
Conclusion :
Je dirais en guise de conclusion que l'énergie pourrait jouer un rôle majeur, d'abord comme facteur fédérateur dans les relations intra-Maghreb et, ensuite, comme élément moteur dans la mise en place d'une coopération régionale Maghreb-Europe, équilibrée solidaire et ambitieuse.
Pour ce faire, il serait nécessaire de réunir deux dimensions indissociables que sont l'entente politique et une approche commune pour affronter les défis auxquels fait face la région.
Il est clair que le remodelage géopolitique en cours, la crise économique qui sévit et la marche, plus que jamais effrénée, de la mondialisation, imposent aux pays euro-méditerranéens de faire rapidement les bons choix, qu'ils soient d'ordre stratégique, économique ou politique.
Par Mustapha K Faïd - Idées-débats - ElWatan - le 27 avril 2011

Méditerranée - Festival Arabesques de Montpellier

Rencontres des Arts du Monde Arabe
Ce Festival créé en 2006 par l'association UNI'SONS, est le rendez-vous de la découverte des arts du monde arabe autour d'une programmation artistique faisant une large part à la musique mais aussi aux autres arts.
ARABESQUES a en effet pour but de faire apprécier la richesse et la diversité des arts arabes, allant du patrimoine artistique traditionnel à la création contemporaine.
Pari réussi puisque le Festival des Arabesques en est à sa sixième édition et n'est pas prêt de s'arrêter, et ce pour notre plus grand bonheur.

Festival Arabesques
du vendredi 20 mai 2011 au dimanche 22 mai 2011
LE FESTIVAL ARABESQUES a pour but de faire apprécier la richesse et la diversité des arts du monde arabe, allant du patrimoine artistique traditionnel à la création contemporaine.
Au programme de cette 6ème édition :
- Orchestre National de Barbès
- HK et les Saltimbanks
- Syrine Ben Moussa
- Al Andalus Danza
- Emel Mathlouthi
- Yahia Bouchala
- Sophia Charaï
- Trio Joubran
- Jil Jilala
- Baâziz
Du 18 au 22 mai : les Chevauchées d'Arabesque
Tous les concerts ont lieu au Domaine d'O, 178 rue de la Carrièrasse à Montpellier
•Tarifs
Concerts Amphithéâtre : 19 € /14€
Concerts Kasbah d’O : 14€/ 10€
Chevauchées arabesques : 8€ / 4€
Soirée conte : 12€ / 8€
Ali aux pays des merveilles : 12€ / 8€
Salah Al Hamdani : 5 €
Pass'journée : 28 € en vente au domaine d'O uniquement. Avec les chevauchées équestres, la kasbah, l'accès à l'amphithéâtre.
Ateliers calligraphie/percussions et la « conférence dégustation » sur le couscous uniquement sur inscription auprès de l’association Uni’sons au 04 99 77 00 17
Tout billet de spectacle du jour donne accès aux expositions, aux animations et à l’espace restauration.

Billetterie domaine d’O
entrée nord : 178 rue de la Carrièrasse, 34097 - Montpellier
Ouverture du lundi au vendredi de 13h à 18h.
En ligne à partir du 11 avril 2011 sur http://www.domaine-do-34.eu/


Directement à l'association Uni'Sons et billeteries habituelles
Plus d'informations sur le festival " Arabesques "
http://www.festivalarabesques.fr/

Renseignements :
UNI’SONS
475 avenue du Comté de Nice
34080 Montpellier
Infoline : 04 99 77 00 17
Domaine d'Ô
Entrée sud : Rond-Point du Château d'O
Entrée nord : 178 rue de la Carriérasse
Tel : 04 67 10 06 79
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Méditerranée - la Turquie comme interface entre l'Europe et le Proche-Orient

Au moment où les révoltes populaires contre des régimes autoritaires s'étendent dans tout le monde arabe, l'Union Européenne est placée devant un choix stratégique concernant son avenir et l'image qu'elle donnera au reste du monde. Devra-t-elle continuer à ignorer la candidature turque au risque de perdre une opportunité majeure d'enfin peser dans l'espace méditerranéen et sur la scène internationale ? Ou bien aura-t-elle enfin le courage d'affirmer son histoire commune avec ce pays et d'ainsi transmettre un message fort aux autres pays du pourtour méditerranéen, que ce soit l'Afrique du Nord, le Proche ou le Moyen-Orient ?
La Turquie est la seule République démocratique en place dans un pays traditionnellement musulman autour de la Méditerranée.

Elle constitue donc une "source d'inspiration" pour les sociétés civiles des pays arabes qui se mobilisent et aspirent à la démocratie et au respect des droits de l'Homme. Ce rôle particulier n'est cependant pas sans lien avec sa vocation européenne et son statut de candidat à l'adhésion. Economiquement dynamique, politiquement indépendante et régionalement puissante, une Turquie démocratique dans l'Union européenne est une source d'inspiration pour l'ensemble des pays actuellement en voie de transition alors même que les négociations d'adhésion avec l'UE sont dans une impasse.
Nos responsabilités partagées sont lourdes. Si les populations qui manifestent feront souverainement le choix de l'avenir de leurs sociétés, il est plus que jamais primordial que le projet européen incarne une promesse de démocratie comme il est primordial que la Turquie achève sa promesse de démocratisation.
Dans une Europe où les minorités sont largement discriminées, une adhésion turque jouerait comme un signal profond et attendu pour rappeler que l'Union européenne n'est pas un club chrétien refermé sur lui-même et sur le passé. Avec l'entrée à terme de la Turquie dans l'UE, il s'agit non seulement de retrouver un passé commun mais aussi de construire un projet européen ambitieux.
C'est dans ce moment de doutes sur elle-même que l'UE questionne l'adhésion de la Turquie mais que la Turquie questionne également son envie à faire partie d'une UE en manque de perspective.
Les questions soulevées par l'adhésion de la Turquie à l'UE sont symptomatiques d'une UE qui doute d'elle-même. A travers son évocation, se cristallisent des questions qui sont fondamentalement celles de l'UE (identités, cultures, définition du projet européen, de son rôle et de sa place dans le monde de demain) et auxquelles il devient urgent de répondre. Mais la Turquie ne se limite pas à n'être qu'un révélateur de l'incapacité des Etats membres à penser et à projeter l'UE. C'est surtout une société jeune en pleine ébullition économique, culturelle et intellectuelle qui prend conscience d'elle-même et de son potentiel.
Pour que les atermoiements sans fin de l'Union européenne ne poussent pas définitivement la Turquie à se distancier du projet européen, nous invitons les Etats membres à faire dès aujourd'hui le calcul du coût d'une non adhésion qui serait imputable à un processus de négociation injuste : entre perte de crédibilité et rancœur, il y a fort à parier que cette erreur pèserait lourdement sur l'avenir de l'UE dans la région.
Il est ironique de voir que la candidature de la Turquie soit finalement le plus virulemment rejetée par le pays européen qui lui ressemble le plus. La France et la Turquie ont en commun une même conception de la laïcité, de l'Etat -fort et centralisé- et d'importantes ambitions géostratégiques.
C'est pour des raisons de politique intérieure que la crédibilité et la capacité décisionnelle de l'UE sont unilatéralement remises en question par des Etats membres. C'est inacceptable pour le projet européen, malhonnête vis-à-vis de notre partenaire et incohérent quant aux politiques que l'UE entend mener en Turquie, notamment en matière de respect des droits de l'Homme.
Certes, la Turquie doit encore faire des progrès importants pour adhérer à l'Union européenne : le problème chypriote doit être réglé équitablement pour les deux parties, le droit des femmes, des minorités, la liberté de la presse et l'indépendance de la justice doivent être renforcés et la question kurde réglée.

Les récentes réformes constitutionnelles sont éloquentes et les réformes doivent se poursuivre pour aboutir notamment à une nouvelle constitution civile qui abandonne la consécration d'une citoyenneté ethno-confessionnelle. Au lieu de capitaliser sur cet élan positif et de l'accompagner, le Conseil de l'Union européenne, sous influence française et chypriote, se montre d'une intolérable fermeture. L'Europe doit certes se montrer exigeante dans ces négociations sur l'acquis communautaire, mais elle ne peut bloquer le processus et ces deux pays doivent permettre l'ouverture de nouveaux chapitres dès cette année.
Gageons que l'UE saura, dans le contexte actuel, mieux prendre en compte les aspirations des pays du Sud de la Méditerranée et leur proposer un partenariat satisfaisant les exigences de développement, de stabilité et de prospérité des deux côtés de la Méditerranée. Une Turquie dans l'Union serait le trait d'union entre un Occident qui risque de se refermer sur lui-même et une tumultueuse et jeune Afrique du Nord qui certes, a encore beaucoup de chemin à parcourir, mais sans laquelle, demain, l'UE n'aura pas d'avenir.
Hélène Flautre est aussi co-présidente de la Commission Parlementaire Mixte UE-Turquie
Hélène Flautre, députée européenne, Bernard Soulage, membre du Comité des Régions d'Europe, président du groupe de travail UE-Turquie


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Méditerranée - Révolutions arabes et migrations

Les révolutions survenues sur la rive Sud de la Méditerranée (Tunisie, Libye, Égypte) n'ont pas manqué de susciter des discours alarmistes sur le risque migratoire qu'elles entraîneraient pour l'Europe. Dans son discours télévisé du 27 février 2011, le président Sarkozy, tout en saluant ces "révolutions arabes", a fait état des éventuelles dérives qu'elles comporteraient en matière de migrations et d'islamisme. Il a indiqué que ces révolutions pourraient avoir des conséquences majeures sur "les flux migratoires devenus incontrôlables et sur le terrorisme", ajoutant que "c'est toute l'Europe qui serait en première ligne". Depuis lors, les media n'ont cessé de s'interroger sur le lien existant entre les révolutions dans ces pays et les mouvements migratoires qui pourraient en résulter, bien qu'il soit rare de voir des révolutionnaires quitter leur pays sans attendre les retombées de leurs actions en matière de libertés et d'égalité.
Une illustration rapide de ces nouvelles mobilités a été donnée par les arrivées sur l'île de Lampedusa : près de 20 000 arrivées depuis le 1er janvier 2011 alors que la capacité d'accueil est de seulement 850 personnes pour le centre d'hébergement. L'île compte donc, à présent, un habitant pour un migrant. Il s'agit de Tunisiens qui ont fui leur pays du fait des difficultés économiques car ils avaient peu d'espoir dans les retombées de la Révolution sur l'emploi et de Libyens qui se présentent comme demandeurs d'asile. Le Président Berlusconi a décidé, depuis la fin mars, de répartir ces nouveaux arrivants dans plusieurs régions d'Italie du Sud, indiquant que seules les demandes d'asile des ressortissants libyens seraient prises en considération.

TUNISIE ET LIBYE : UN PAYS DE DÉPART ET UN PAYS D’ACCUEIL
Un aperçu des contextes migratoires de départ et d’accueil sur la rive Sud de la Méditerranée conduit tout d’abord à identifier des situations très différentes entre les pays. La Tunisie est un pays d’émigration, dont 50 % de la population a moins de 25 ans. Elle est largement urbaine et scolarisée et près de 30 % des 18-35 ans y sont au chômage. Mais, du fait de sa position géographique et de sa proximité de l’Europe (138 kms la séparent de l’île de Lampedusa, au large de la Sicile), elle est aussi une terre de transit traversée par des sub-sahariens désireux de passer en Europe.
Selon le rapport des Nations unies sur la population de 2009, la Libye, autre terre de transit, abrite 780 000 étrangers. Mais, à l’inverse de la Tunisie, elle est un pays d’immigration du fait de ses ressources pétrolières. Elle attire donc une migration Sud-Sud, qualifiée ou non, provenant essentiellement des États voisins (Niger, Égypte, Tunisie, Maroc, Algérie) mais également des pays de l’Afrique sub-saharienne.
Depuis le début des événements, la plupart de ces migrants sont repartis dans leurs pays d'origine qui, comme le Maroc, ont parfois organisé eux-mêmes le retour de leurs expatriés. D'autres sont retournés chez eux par d'autres moyens, inquiétés par le climat de violence qui règne dans le pays. L'Égypte, quant à elle, est un pays de départ vers les pays du Golfe, l'Italie, la Libye et, dans une moindre mesure, vers quelques autres pays européens tels que la France ou l'Espagne.
Ces pays d'Afrique du Nord ont signé avec leurs voisins européens (France, Italie) mais aussi avec l'Union européenne des accords de réadmission bi- et multilatéraux. Ils s'y engagent à reprendre sur leur sol les sans-papiers reconduits à la frontière par les pays européens, qu'il s'agisse de leurs nationaux ou des migrants qui ont transité par leur territoire et ont ensuite été interpellés en Europe. Bien que ces accords constituent des engagements pris d'État à État ou avec l'Union européenne, ils ont souvent été négociés d'homme à homme entre les Présidents Berlusconi et Khadafi ou Ben Ali. En contrepartie, l'Union offre des prestations compensatoires : des cartes de séjour pour les candidats au départ très qualifiés, des mesures d'aide au développement ou des "cadeaux" tels que l'annonce, en 2010, de la construction, par des entrepreneurs italiens, d'une autoroute reliant l'Est et l'Ouest de la Libye.

La fin de ces régimes autoritaires sous-entend-t-elle la fin de leur engagement à être les boucliers de l'Europe contre l'immigration clandestine ou n'a-t-elle que peu d'incidences sur leur statut de garde-frontières ? Pour l'instant, il n'y a pas de véritable démarche d'intégration régionale et les relations entre le Nord et le Sud sont asymétriques. La seule politique multilatérale de l'Union européenne dans ce domaine consiste donc à multiplier les accords, plus souvent bilatéraux que multilatéraux.

LA TUNISIE : DES DÉPARTS ÉCONOMIQUES
En Tunisie, il est indéniable que des candidats au départ dont le projet était sans doute bien antérieur aux événements, ont voulu profiter de l'opportunité d'un contrôle policier relâché aux frontières de l'Union. Considérant que les autorités ont lâché du lest, ces candidats veulent tenter leur chance sur des embarcations de fortune à partir de points de départ moins empruntés, comme la région de Zarzis près de l'île de Djerba. Le chômage, la pauvreté, l'absence d'espoir dans l'avenir, la faible confiance à l'égard des retombées de la Révolution en matière d'emploi et de niveau de vie les poussent à partir.

Il ne s'agit ni de demandeurs d'asile ni de proches du régime du Président Ben Ali, mais de migrants économiques prêts à mourir en mer pour un rêve d'Europe ou de France. Ils fuient également la confusion qui règne dans le pays et craignent les séquelles de la dictature. La plupart se sont retrouvés à Lampedusa, petite île de 20 kms carrés, où 15 000 migrants étaient arrivés entre janvier et fin mars 2011, contre à peine 25 arrivants durant toute l'année 2010. On compte peu de non-Tunisiens parmi les nouveaux arrivants : 2 000 personnes qui s'entassent dans un centre d'accueil d'une capacité de 850 lits alors que d'autres dorment à la belle étoile. La situation est rendue critique par le manque d'eau et de soins aux enfants et l'Italie appelle en vain ses voisins européens pour qu'ils partagent le fardeau. Une partie des sans-papiers est évacuée vers la péninsule.
Les migrants en transit en Tunisie et en attente d'un passage vers le continent européen ont pris d'autres routes ou sont revenus à leur point de départ, en Afrique sub-saharienne. Mais il ne s'agit ni d'une hémorragie, ni d'une invasion. Un plan italien prévoit d'accueillir sur le territoire national des Libyens car ils sont considérés comme des demandeurs d'asile alors que les Tunisiens, qui ne sont pas regardés comme tels, ne peuvent pas être juridiquement admis. De son côté, la Tunisie accepte le retour de ses ressortissants mais au rythme de quatre par jour seulement. Elle doit également faire face à l'arrivée de quelques dizaines de milliers de ses ressortissants qui étaient installés depuis plusieurs années en Libye, ainsi qu'à celle de migrants dont la vie est menacée en Libye et qui attendent d'être rapatriés par le HCR ou l'OIM : travailleurs subsahariens, bangladeshis mais également libyens, somaliens, érythréens ou soudanais.

LES RAPATRIEMENTS DE TRAVAILLEURS AU DÉPART DE LA LIBYE
En Libye, au contraire, le flux des migrations de travail Sud-Sud s'est inversé pour prendre le chemin du retour vers le pays d'origine, rapatriement parfois organisé par les gouvernements, parfois non, laissant les réfugiés massés aux frontières. Depuis le 20 février 2011, 336 658 personnes ont ainsi fui la Libye en situation de guerre civile, dont 165 000 vers la Tunisie à Ras Adjir. Depuis février, les Africains de l'Ouest qui y travaillaient ont quitté la Libye à destination du Niger pour fuir les violences.

Plus de 10 000 ressortissants de cette région du continent sont ainsi partis, Nigériens en majorité mais aussi Sénégalais, Burkinabés, Maliens, Guinéens, Ivoiriens, Bissau-Guinéens, Gambiens, Togolais, Sierraléonais et Nigérians. Les travailleurs marocains ont été rapatriés, à raison de plusieurs milliers. 90 000 personnes attendent d'être rapatriées depuis les frontières égyptiennes et tunisiennes. Les pays voisins de la Libye ont été invités par l'ONU à maintenir leurs frontières ouvertes face au flot de réfugiés. 1 250 personnes avaient fui le pays par l'Égypte courant mars et un millier d'entre elles ne souhaitent pas retourner en Libye.

On peut penser que les accords bilatéraux signés entre le gouvernement Berlusconi et le régime du colonel Khadafi, en vertu desquels ce dernier bloquait les frontières au départ de la Libye, ne sont pas appliqués. Là encore, les forces de sécurité tunisiennes et libyennes n'ont pas fait du contrôle des frontières leur priorité pendant cette période. Mais il s'agit surtout de migrations de retour Sud-Sud. Ainsi, sur les 300 000 personnes ayant fui la Libye vers l'Égypte et la Tunisie, environ 50 000 ont été rapatriées dans leurs pays d'origine par le HCR : Bangla- Desh, Guinée et Soudan. Selon William Swing, directeur général de l'OIM, "c'est l'une des plus importantes évacuations humanitaires de l'histoire".

Enfin, des Libyens se sont réfugiés à la frontière égyptienne, craignant les attaques de représailles des partisans progouvernementaux dans l'Est du pays.

UN TEST POUR L'EFFICACITÉ DES INSTRUMENTS DE CONTRÔLE EUROPÉENS
Au Sud, la perte du contrôle sur les accords de réadmission que sous-entend la fin des dictateurs qui en avaient été signataires, pose la question de l'efficacité des autres instruments de contrôle européen des frontières : Schengen pour le contrôle des frontières externes de l'Europe, Dublin pour le droit d'asile vers l'Europe, Frontex (agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures) pour la mise en commun des polices européennes au service du contrôle des frontières.
De l'avis du HCR, il ne s'agit pas d'un exode de masse, mais les chiffres ne reflètent pas toute la réalité, car beaucoup franchissent les frontières sans papiers et ne sont donc pas comptabilisés. Néanmoins, depuis début mars, dans le cadre d'un programme d'évacuation d'urgence, le HCR et l'OIM ont organisé plus de 364 vols de rapatriement pour 58 200 personnes originaires de Tunisie, d'Égypte et du Niger qui séjournaient en Libye. La situation étant évolutive, les organisations internationales poussent à la flexibilité et demandent aux pays voisins de la Libye de laisser les frontières ouvertes pour permettre à la communauté internationale d'agir.
On peut alors s'interroger sur l'efficacité réelle des instruments de contrôle des frontières externes de l'Union européenne, mis en place par le pacte adopté en 2008 lors de la présidence française de l'Union européenne. Fer de lance de la politique européenne d'immigration et d'asile, que fait Frontex ? L'agence porte secours aux naufragés de Méditerranée pour les amener sur les côtes européennes et déplore son manque de moyens bien que son budget ait été porté à 88 millions d'euros.

L'Union européenne a récemment dépêché des experts de Frontex pour analyser la situation, mais l'agence ne peut repousser ceux qui demandent l'asile au nom du respect de la Convention de Genève. Les aventuriers de la mer risquent donc la condamnation chez eux et dans les pays qui les accueillent.
Cette migration montre que le dispositif européen, conçu essentiellement comme une force de dissuasion, est peu efficace face à la détermination des candidats au départ et aux crises politiques imprévisibles. Elle montre aussi les limites de la solidarité des pays européens qui ne se sont pas bousculés pour "partager le fardeau" avec l'Italie. Comme la Tunisie, la Libye et l'Égypte n'ont pas d'accord multilatéral de réadmission avec l'Union européenne.
Elles ne peuvent donc reprendre des nationaux qu'en vertu d'accords bilatéraux signés avec des États européens ou des voisins de la rive Sud de la Méditerranée. Elle révèle également les limites des accords bilatéraux de contrôle des frontières lorsqu'ils sont signés, voire marchandés entre chefs d'État et que les régimes qui succèdent aux dictateurs ne se considèrent plus vraiment tenus de les respecter. Enfin, elle illustre la variété, souvent ignorée, des situations migratoires dans les pays de la rive Sud de la Méditerranée.
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Source LeMonde.fr - le 26 avril 2011
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/04/26/revolutions-arabes-et-migrations_1512776_3232.html

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Méditerranée - Au Maroc, le "printemps arabe" n'est pas nouveau

Que dire et penser des événements qui secouent plusieurs pays arabes ? Quelles premières conclusions tirer, globalement, des différentes évolutions enregistrées ?
Prenons d'abord bonne note de quelques évidences. Il n'existe pas, et il faut s'en réjouir, d'exception arabe aux aspirations universelles des peuples à la liberté et à la démocratie. Il ne saurait y avoir de développement économique et social sans évolution politique et démocratique parallèle. Toute société qui aspire au progrès doit marcher sur ses deux jambes. Dans le monde arabe, aussi, n'en déplaise à ceux qui, au nord comme au sud de la Méditerranée, ont voulu sacrifier l'exigence démocratique sur l'autel de la sécurité et de la stabilité. La croissance économique doit aller de pair avec le développement humain, ainsi qu'avec une juste répartition sociale et territoriale des richesses. Le progrès économique et social ne vaut que s'il est équitablement partagé.

Ensuite, évitons les amalgames. Toute assimilation ou comparaison entre le "printemps arabe" et les révolutions qui ont renversé, au début des années 1990, les régimes de l'Europe de l'Est, serait trompeuse et abusive. Dans le cas de ces pays, il s'agissait de systèmes strictement identiques, placés sous la tutelle ferme et directe de l'URSS. La chute de l'Union soviétique a, naturellement, entraîné l'effondrement de ses "satellites-clones". A l'inverse, le monde arabe n'est pas un bloc monolithique. Aucun des régimes politiques en présence ne ressemble à un autre. Les monarchies y côtoient les républiques, les pouvoirs militaires les régimes civils, le système de parti unique le multipartisme. Plus encore, le degré de légitimité du leadership en place diffère considérablement selon les pays. Enfin, certains Etats se distinguent, également, par de fortes réalités tribales ou de nets clivages ethniques et religieux.
Ensuite, les anciens pays du bloc de l'Est ont bénéficié de la prise en charge concertée et volontaire d'institutions structurées. Ils ont reçu les fonds, l'expertise, l'assistance et le soutien de l'Union européenne, mais aussi de l'OTAN, du Conseil de l'Europe, ou encore de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Les Etats arabes, quant à eux, ne bénéficient pas d'une prise en charge similaire à la formidable puissance intégratrice de l'Union européenne. L'organisation régionale, la Ligue arabe, n'a jamais réussi à inventer et à développer de modèle d'intégration véritable, que ce soit au niveau politique, économique, ou en termes de régulation et de gestion des crises.
Cependant, s'il est vrai que les Etats arabes détiennent, chacun, leurs particularités, il n'en demeure pas moins que ces pays sont traversés par des aspirations comparables et confrontés à des défis similaires. Ces pays sont, tous, caractérisés par une population extrêmement jeune, dont la moitié a moins de 25 ans, un taux de chômage élevé, y compris parmi les jeunes diplômés, de fortes disparités sociales, un sentiment prégnant d'injustice et d'exclusion et, enfin, des problèmes de gouvernance, de transparence et de corruption.
Pour autant, les changements souhaités ne seront pas opérés de manière identique. Ils interviendront de façon différenciée d'un pays à l'autre. Il n'y aura pas d'effet domino des expériences tunisienne et égyptienne, où des régimes à bout de souffle et sclérosés n'ont jamais esquissé ou préparé une réelle alternance, en-dehors de leur clan ou de leur système.

Il faut encore conforter les transitions en cours et gérer les risques. Dans ces pays, les révolutions sont nées à la faveur d'une alliance singulière et hétéroclite entre la gauche radicale, de jeunes internautes et les mouvements islamistes. Au sein de cette coalition inédite, les islamistes ont délibérément opté pour la discrétion, de peur de braquer la population nationale, mais aussi et surtout d'effrayer l'opinion publique internationale. Le retrait tactique des formations islamistes a, également, pour objectif de leur laisser le temps de sortir du format de nébuleuse tolérée mais informelle auquel elles étaient jusque-là cantonnées, pour se structurer en organisations politiques et partisanes.
Rien ne garantit qu'au "printemps arabe" en cours dans ces pays succède un "été arabe". L'hypothèse d'un passage abrupt à un "hiver sombre", autocratique, dictatorial, plus répressif encore, n'est malheureusement pas encore totalement écartée. L'expérience iranienne de 1979 reste encore vivace dans les esprits. Enfin, il est à craindre qu'Al-Qaida, après avoir été apparemment prise au dépourvu par ces événements, ne tente de s'y greffer. Le pire n'a donc pas encore été définitivement évité, et tout doit être entrepris pour annihiler l'ensemble de ces risques potentiels et accompagner ces transitions vertueuses et prometteuses, de manière pacifique et non chaotique. A cette fin, un nouveau et immédiat "pacte euroméditerranéen pour la démocratie et le codéveloppement" s'impose. Il prendrait le relais, de manière solidaire et audacieuse, de l'actuelle politique de voisinage de l'Union européenne.

Dans ce contexte, le Maroc a des spécificités avérées et significatives. Le Maroc indépendant a rejeté, de manière catégorique, le système de parti unique. A l'heure où d'autres courants traversaient, majoritairement, le monde en développement, l'acquis précieux de la pluralité politique et de la diversité d'opinion a pu être réalisé, au bénéfice de l'ensemble du pays. Non sans difficultés au demeurant.
Au Maroc, la monarchie millénaire, ciment de l'unité de la nation et garant d'une forte identité aux sources plurielles, se distingue par son dynamisme réformateur, sa légitimité profonde, sa capacité d'écoute permanente, et sa faculté à identifier, pour mieux les combattre, les maux et les dysfonctionnements de la société.
Au Maroc, il existe un jeu politique, certes perfectible, mais réel, où les clivages s'expriment et où la liberté d'expression et de manifestation est assumée et assurée. Les instruments d'intermédiation, les courroies de transmission et les instances de régulation y sont bel et bien présents, bien qu'ils connaissent, parfois, des difficultés, qu'il leur arrive de grincer, de s'emballer ou, à l'opposé, de s'arrêter.
Le Maroc ne craint pas le changement. Bien au contraire, il a connu, en 1998, une alternance gouvernementale pacifique et paisible, dans le cadre de ses institutions et de ses traditions politiques. De plus, il s'est engagé, depuis plus d'une décennie, dans un vaste chantier de transformations majeures, d'ouverture politique considérable, de développement économique soutenu et de progrès social significatif. Les mérites et les résultats de ces réformes sont reconnus par les marocains et salués par la Communauté internationale. C'est précisément le souci permanent de concilier réformes économiques et sociales d'une part, et avancées politiques et démocratiques d'autre part, qui a valu au Maroc l'octroi, par l'Union européenne, du statut avancé, réelle reconnaissance des progrès accomplis par le passé et véritable pari sur leur approfondissement à venir.
Ces réalisations méritent, bien entendu, d'être poursuivies, confortées et approfondies. Pour que la portée des réformes soit optimale et leur accessibilité effective, elles doivent être menées avec une rigueur accrue, des mécanismes de gouvernance rénovés et une transparence renforcée. Car si le chemin parcouru, ces dernières années, est significatif, des défis importants doivent encore être relevés, notamment dans domaine de l'éducation, de la justice, de la santé ou de la lutte contre la corruption.
Le Maroc ne craint pas, non plus, la réforme. Même la Constitution, libérale dès 1962, a été amendée à quatre reprises depuis lors. Ainsi, Mohammed VI a annoncé, le 9 mars, le lancement d'une réforme constitutionnelle large, audacieuse et avant-gardiste. Cette dernière ne sera pas uniquement limitée au processus de régionalisation avancée engagé par le souverain dès novembre 2009, et qui comporte pourtant, à lui seul, des avancées majeures en termes de démocratie et de gouvernance locales.
Ainsi, le roi a exprimé la volonté que la réforme aille bien au delà, dans le cadre d'une réforme constitutionnelle globale et profonde, qui doit assurer la consécration constitutionnelle de l'amazighité (l'identité en berbère), la consolidation de l'Etat de droit, la garantie de l'indépendance de la justice, la consolidation du principe de séparation et d'équilibre des pouvoirs (avec la consécration du principe de la nomination du premier ministre au sein du parti politique arrivé en tête des élections), le renforcement des organes et outils d'encadrement des citoyens, la consolidation des mécanismes de moralisation de la vie publique et la constitutionnalisation des instances en charge de la bonne gouvernance, des droits de l'homme et de la protection des libertés. Ce processus sera mené en consultation et en concertation étroites avec les forces vives de la nation, et notamment les partis politiques, les syndicats et les organisations de la société civile, y compris celles représentant la jeunesse.
Il s'agit là d'une étape historique pour la nation marocaine dans son ensemble. C'est un nouveau pacte entre le trône et le peuple qui se contracte. C'est une dynamique sans précédent vers la consolidation de la démocratie, de l'Etat de droit et des libertés individuelles qui a été enclenchée, selon une démarche rigoureuse et participative. Vaste et exhaltant projet. A nous, Marocains, de nous l'approprier. Dans sa plénitude.
Ainsi, malgré l'ensemble des difficultés rencontrées, des hésitations marquées et des tâtonnements observés, le Maroc avance. Il a emprunté un escalier qui le mène, progressivement, vers la consolidation de la démocratie et de l'Etat de droit. Il lui arrive de s'attarder sur une même marche. Mais il lui arrive, aussi, de grimper des marches trois par trois. L'essentiel est qu'il s'élève toujours vers le haut, vers le meilleur, dans la sérénité, la continuité et l'engagement.
Le modèle marocain, au même titre que les expériences turque et indonésienne, confirme que l'islam est parfaitement compatible avec la démocratie, les droits de l'homme et les libertés. Il est la preuve concrète et tangible que l'évolution est possible sans effusion de sang, sans rupture, sans chaos, dans un cadre structuré et pacifique, qui prend régulièrement en compte les attentes, les aspirations et les préoccupations de tous les citoyens, sans exception.
Taïb Fassi Fihri, ministre des affaires étrangères et de la coopération du royaume du Maroc
Source LeMonde.fr
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/31/au-maroc-le-printemps-arabe-n-est-pas-nouveau_1501170_3232.html

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Méditerranée - Initiative “Croire dans le Dialogue, Agir pour la Citoyenneté” : Appel à participants

Durant les derniers mois, le paysage méditerranéen a été témoin d’une vague de changements historiques. Les soulèvements en Tunisie et en Égypte, ainsi que d’autres mobilisations sociales dans la région dans son ensemble, ont démontré que la jeunesse et la société civile sont désireux de plus de liberté, de changements sociaux et de consolidation des valeurs démocratiques au sein de leurs sociétés respectives.
Dans ce contexte, et en réponse à la préoccupation de ses Réseaux Nationaux sur les implications et défis que ce tournant historique peut apporter au travail de la Fondation et de la société civile au sens large, la Fondation Anna Lindh a décidé de lancer une initiative à l’échelle régionale intitulée “Croire dans le Dialogue, Agir pour la Citoyenneté – Échanger les pratiques sur la participation et la démocratie”.
L’Initiative vise à échanger les bonnes pratiques et débattre à propos de la citoyenneté et de la démocratie parmi les opérateurs culturels, les organisations non-gouvernementales, les media et les jeunes militants au niveau Euro-Med ainsi qu’ à renforcer et construire les capacités des organisations membres des réseaux de la société civile d’Anna Lindh.
Dans ce cadre, deux évènements majeurs vont avoir lieu dans les capitales tunisienne et égyptienne:

Séminaire Régional sur le dialogue interculturel et le changement social – Le Caire (Égypte) du 1 au 6 juin 2011
Le Séminaire de Formation du Caire, qui réunira plus de 50 participants arabes, consistera en un programme de renforcement des capacités pour les Réseaux Anna Lindh arabes, abordant les nouveaux défis des sociétés civiles du sud et préparant à de nouvelles actions et initiatives.
Le Séminaire se concentrera sur le rôle de la société civile dans la promotion de la citoyenneté et la démocratie à travers le dialogue interculturel ; le renforcement du leadership pour la jeunesse et leur rôle dans les changements sociaux engendrés; et le renforcement de l’usage des medias sociaux et des nouvelles technologies dans l’information et la communication.
Les militants de la société civile qui souhaiteraient participer au Séminaire de Formation du Caire peuvent déposer leur candidature en tant que participants.
Les candidats ayant été sélectionnés pour l'Appel pour Formateurs seront avertis le 26 avril 2011.
Les candidats ayant été sélectionnés pour l'Appel pour Formateurs seront avertis le 2 mai 2011.

L’Échange Anna Lindh – Tunis (Tunisie), du 23 au 26 juin 2011
L’Échange Anna Lindh en Tunisie est une réunion à l’échelle régionale d’acteurs de la société civile agissant pour la démocratie et les libertés avec une perspective interculturelle.
Réunissant entre 150 et 200 participants de l’ensemble de la Région Euro-Med qui travaillent dans les domaines de la création artistique, les medias et réseaux sociaux, le développement de la société civile et des ressources pour la citoyenneté, l’évènement sera une excellente occasion pour les participants d’apprendre les uns des autres, d’échanger des expériences, des meilleures pratiques et des idées de projets ainsi que de construire des partenariats.
Les participants débattront aussi des défis majeurs auxquels les sociétés Euro-Med font face en termes de promotion de la citoyenneté et du dialogue interculturel, en particulier dans un contexte de changement social et de transition démocratique.
L’Échange Anna Lindh offrira les espaces suivants :
• Sessions plénières,
• Ateliers débat,
• Présentation des Meilleures Pratiques et Idées de Projets,
• Ressources pour l’Action et
• Salle pour des échanges informels.


CANDIDATURE EN TANT QUE PARTICIPANTS : Date limite mardi 3 mai 2011, 15 :00 heure égyptienne
Pour télécharger l’Appel à Participants


Pour télécharger le Formulaire de Candidature

http://www.euromedalex.org/sites/default/files/Formulaire_Candidature_Tunis_FR.doc
En outre, Cette initiative englobe les nouvelles activités spécifiques suivantes, ainsi que des actions déjà programmées et revues pour l’occasion :
• Lancement du Prix euro-Med 2011 sur le thème “Dialogue pour la Citoyenneté et la Liberté”
• Lancement d’une catégorie spéciale de l’édition 2011 du Prix Euro-méditerranéen de Journalisme de la Fondation Anna Lindh, sur le thème de « Reporter sur la participation des jeunes dans le changement social ».
• Organisation d’un événement avec les médias pour débattre de la manière de rapporter les transformations survenues dans la région et du rôle des médias sociaux (partenariat: CE, Task Force Euro-Med Média)
• Soutien à des actions locales et attention spéciale lors du Festival Farah el Bahr pour les thèmes de l’Initiative FAL
• Mettre en place un nouveau mécanisme de soutien financier pour permettre aux Réseaux Nationaux d’inviter des organismes venant d’autres pays Euro-Med, de préférence des membres des réseaux et autres organismes du Sud et en particulier de Tunisie et d’Egypte, à participer dans les réunions et actions locales menées dans le cadre de l’Initiative « Croire dans le Dialogue, Agir pour la Citoyenneté ».
• Réunion du Conseil consultatif avec les membres d’origine du Groupe des Sages sur le dialogue interculturel afin de réévaluer le rôle du dialogue au sein de la région Euro-méditerranéenne
• Rapport Anna Lindh 2012: Le prochain sondage et les analyses afférentes devront être adaptés à la nouvelle situation lors de la première réunion du comité des experts du Rapport
Pour de plus amples informations, veuillez contacter:
team@believeindialogue.org
Source :
http://www.euromedalex.org/fr/nouvelles/initiative-croire-dans-le-dialogue-agir-pour-la-citoyennet-appel-participants
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Espace méditerranéen : l’intégration de l’énergie propre en question

L’Université libanaise de Hadeth a accueilli les 14, 15 et 16 avril un cycle de conférences sur le thème de l’intégration des énergies renouvelables en Méditerranée. Une première pour le pays qui entend l’inscrire dans ses priorités.
La conférence internationale sur « l’impact des énergies renouvelables sur l’avenir de l’environnement méditerranéen », organisée à l’initiative de l’Université libanaise, de l’association MEDgreen, du CNRS et avec la participation de l’ambassade de France, s’est tenue au campus Rafic Hariri à Hadeth. Pendant trois jours, la conférence a été rythmée par de nombreuses interventions. Les nombreux chercheurs mobilisés, venus du monde entier, ont témoigné du regain de dynamisme pour cette question dans la région.
La préoccupation grandissante concernant le réchauffement climatique a conduit, depuis quelques années, la communauté internationale à multiplier les séminaires sur le sujet. C’est aujourd’hui le Liban qui s’inscrit dans ce mouvement pour « réfléchir à son niveau » à une utilisation privilégiant les énergies propres aux énergies fossiles. Chercheurs et académiciens n’entendent pas rester sans voix devant la crise énergétique qui touche le pays et sont venus en nombre prendre part à la toute première manifestation de ce genre à Beyrouth.

Une conférence pertinente et opportune
« Comme tous les pays du sud de la Méditerranée, le Liban est doté de caractéristiques climatiques plus importantes qui privilégient le développement pour la région des énergies renouvelables », a précisé le recteur de l’UL, Zouheir Chokr, avant d’ajouter : « Selon les chiffres officiels, la facture énergétique du pays a atteint les 5 milliards de dollars par an et la demande ne fait que croître. » L’intégration de l’énergie propre est donc une priorité à la fois locale et régionale.
L’utilisation des énergies alternatives est essentielle et à plusieurs titres : la lutte contre le réchauffement climatique, l’indépendance énergétique, la création d’emplois et, plus largement, le développement économique et social du pourtour méditerranéen.
« Cette conférence est particulièrement pertinente et opportune, surtout pour le Liban, pour la crise énergétique qui s’aggrave de jour en jour et où nos énergies alternatives naturelles et renouvelables sont sous-exploitées », s’est exclamé M. Hamzé, le secrétaire général du CNRS. Le Liban, qui connaît un taux d’ensoleillement d’environ 300 jours par an, a en effet tous les prérequis pour l’adoption d’un modèle privilégiant les énergies propres. Il dispose en outre d’une force éolienne assez conséquente et d’un réseau fluvial tout aussi important.

La dynamique euro-méditerranéenne en marche
« Le partenariat qui s’est instauré autour de cette conférence illustre bien la vigueur et l’intensité de la relation de coopération et d’échanges qui unit nos deux pays », a rappelé l’ambassadeur de France, Denis Pietton, absent de la manifestation, mais représenté par son premier conseillet, Didier Chabert. La conférence, qui s’inscrit dans l’actualité brûlante de la catastrophe nucléaire de Fukushima, a été aussi l’occasion de donner au public un éclairage nécessaire face à la complexité des découvertes scientifiques.
« Aujourd’hui, il y a une demande sociale forte en matière d’information, de transparence et de réflexion collective autour de nos choix de société. Je vois dans l’organisation de cette conférence scientifique, ici au Liban, une possible réponse à l’exigence de démocratie et de transparence citoyenne », a-t-il déclaré. Et le secrétaire général du CNRS de souligner la nécessité dans ce domaine que « la politique montre la voie et prenne des décisions stratégiques visant à encourager et à promouvoir toute initiative déterminante et durable ».
S’il y a cinq ans le sujet ne concernait que le cercle restreint des scientifiques, l’environnement est désormais inscrit dans le débat public et dans l’arène des décideurs. Le célèbre astronome Hubert Reeves, qui a honoré la conférence de sa présence, s’est dit « optimiste » et « enthousiaste » face à ce témoignage collectif.
Source : http://mplbelgique.wordpress.com/2011/04/20/espace-mediterraneen-l%e2%80%99integration-de-l%e2%80%99energie-propre-en-question/

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L’Algérie citée comme une référence dans la combinaison du gaz et du solaire

Une politique en faveur des énergies renouvelables permettrait de mieux envisager la durabilité énergétique, selon la vision perçue par le Plan Bleu, un centre d’activités régional sur l’environnement et le développement en Méditerranée, en coordination avec le programme de l’ONU, le PNUE, qui va publier, annonce-t-il, un rapport sur "un scénario de rupture" énergétique pour 2030.

Les pays de la zone méditerranéenne, du nord au sud, gagneront, selon cet organisme onusien, 80 millions d’habitants d’ici 2025, dans un contexte d’urbanisation rapide. Les besoins en énergie augmenteront de ce fait de façon très importante et généreront des investissements colossaux, soit 450 milliards de dollars, au bas mot, selon des estimations du Plan Bleu.
L’étude prospective du Plan Bleu, "Infrastructures et développement énergétique durable en Méditerranée : perspectives 2025 " montre aussi que l’essentiel de l’énergie fournie sera d’origine fossile. Le bouclage euro-méditerranéen, assuré par 9 gazoducs importants, induit aussi une nouvelle importance de cette source d’énergie gazière. "C’est au moment de décider de ces investissements importants qu’il s’agit de bien faire les choix, car une fois le coup parti, il y en a pour des années", insiste El Habib El Andaloussi, le rédacteur du rapport du Plan Bleu. Or, à côté d’un scénario de développement non durable, il en propose un autre, alternatif, dit " de rupture " avec le schéma énergétique hérité des années de pétrole.
Ce scénario mise à la fois sur l’effacement énergétique et sur le recours aux énergies non fossiles. " C’est parfaitement crédible, les technologies sont là et évoluent très vite, pensez que l’on sera bientôt capable d’installer des éoliennes off-shore flottantes à 200 km des côtes et au-dessus de fonds de plus de 60 m ", reprend M. El Andaloussi, " et songez que le Liban distribuera, l’an prochain, trois millions d’ampoules à basse consommation aux ménages tout en éliminant les lampes 100 w traditionnelles ", a-t-il ajouté dans la note publiée par le Plan Bleu. Les pays producteurs de pétrole eux-mêmes s’y mettent pour économiser la ressource.
Sonatrach, Neal et Abengoa en Algérie, lancent, et ils ne sont pas les seuls, selon le même expert, une série d’unités de production faisant appel à la fois au gaz et au solaire, alors que d’autres, comme le Maroc dépourvu de sources d’énergie à bas coût, développent à tout va champs d’éoliennes et centrales thermo solaires. " Si ces politiques sont conçues pour le long terme, s’il ne s’agit pas de simples " coups ", le scénario de rupture n’est pas du tout utopique ", insiste El Habib El Andaloussi. Il serait même inscrit dans les grands projets comme Désertec, ou le Plan solaire méditerranéen, ou encore dans Transgreen, le réseau de transport nord-sud d’énergies vertes. Ou dans les Centrales à Concentration solaire dont seuls le Maroc et l’Algérie prévoient d’installer sept unités de 500 MW chacune, à condition de trouver les financements.
Certains pays de la région ont déjà accompli des avancées considérables en matière de développement des énergies renouvelables, et ambitionnent de porter entre 20% et 42% la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité en 2030. Le scénario 450 de l’Association internationale de l’énergie, paru en novembre 2010, prévoit pour l’Afrique du Nord une capacité en énergies renouvelables de 76 GW en 2035. "A vrai dire, la crise aiguillonnerait plutôt ce type de projets car la production d’énergies fossiles ou leur importation pèsent encore plus sur les budgets ". En tout cas, selon El Habib El Andaloussi, si la part des énergies renouvelables aujourd’hui dans le mix énergétique représente 7% du total (et le pétrole 40% ) en Euroméditerranée, et ne représenterait que 12% à l’horizon 2030 dans un scénario traditionnel, le scénario de rupture brossé par le Plan Bleu amènerait, lui, les énergies renouvelables à hauteur de 23% du mix énergétique,toujours en 2030.

"Nous calculons que cela permettrait d’économiser l’équivalent d’une centaine de centrales thermiques" et un investissement gigantesque pour des équipements vite obsolètes, conclut le chercheur du Plan Bleu.Ce scénario de rupture, actuellement affiné, sera publié au cours du premier semestre 2011. Il est à noter qu’un rapport d’étape sur l’énergie dans le bâtiment a été publié dès décembre 2010. L’initiative n’est pas anodine, les experts prévoient la construction de 42 millions de logements dans les pays du sud en 2030. Le logement est, et sera le premier poste consommateur d’énergie.
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© Portail des Energies Renouvelables en Algérie - le 24 avril 2011
Source
http://portail.cder.dz/spip.php?article1168

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